L'esclavage existe encore...

Publié le par LM Soubrier

Histoire que m'a raconte Josetitto, un des jeunes de la Ciudad de los Muchachos.... l'esclavage existe encore...

Je m'appelle Josetitto. J’ai 15 ans. Je suis depuis 3 ans interne à la Ciudad de los Muchachos. Quand j’avais 10 ans, une de mes tantes qui habitait Tambubamba est venu chez moi. Je vivais avec ma mère et mes 5 frères et sœurs – mon père étant décédé quelques années auparavant. Cette tante proposa à ma mère de m’emmener à Tambubamba pour me donner du travail. Ma mère, sans bien savoir ce qui allait m’attendre, accepta et me laissa partir. Une fois arrivé à Tambubamba, ma tante me fit travailler dans un hotel-restaurant.

Je commençais à travailler à 3h du matin et terminais le soir à 10h. J’étais chargé de laver les plats et les assiettes. J’étais responsable de la propreté du restaurant. Je devais aussi nettoyer toutes les chambres de l’hôtel. J’étais le seul « employé » pour faire le nettoyage de cet Hôtel-Restaurant. J’étais chargé aussi de nettoyer le poulailler de la patronne, et entre autres de ramasser les excréments des poules. En plus, je devais faire chaque jour trois kilomètres à pied pour aller acheter une bouteille de gaz pour la cuisine du restaurant. Une bouteille de gaz pesait 20 kilos… Je ne sais pas comment j’ai pu réussir à porter un poids de vingt kilos chaque jour pendant un an, sur une telle distance, à l’age de 10 ans.

Chaque dimanche, ma patronne me faisait même travailler pour les autres hôtels environnants. Je devais nettoyer les toilettes de tous ces hôtels-là. Au bout de quelques semaines, je n’en pouvais plus. Je n’arrivais pas à tenir ce rythme de travail effréné. Mais je n’avais pas le choix. Et puis, à 10 ans, je ne me rendais pas compte que l’on se « servait » de moi. Ma patronne exigeait. J’obéissais sans poser de questions. Ça me paraissait normal. En fait, ma patronne profitait de la naïveté et de la faiblesse d’un enfant.

Le moment que je redoutais par-dessus tout, c’est quand il m’arrivait de casser une assiette. La patronne m’insultait dans ces cas-là et me faisait travailler toute la nuit suivante. J’ai travaillé là-bas pendant toute une année. Cette année-là, je n’ai pas pu aller à l’école. J’avais pourtant demandé à ma patronne de pouvoir y aller quelques heures par jour. Mais elle avait refusé.

Ma tante ne savait pas exactement quelles étaient mes conditions de travail… Ou plutôt ne voulais pas le savoir.  Je la voyais uniquement le dimanche et ne lui disais rien de ce que je faisais la semaine. Cette situation l’arrangeait bien. C’est elle qui recevait mon « salaire » chaque mois. Je n’ai jamais rien reçu en un an de travail.

Je suis tombé malade plusieurs fois à Quillabamba. Mais à chaque fois, ma patronne m’interdisait de prendre quelques instants de repos : je devais travailler. Combien de fois ai-je eu des maux de têtes, des mal de ventres… Je n’avais aucun médicaments pour me soigner. Une fois, une plaie que j’avais sur la jambe s’était infectée. J’avais beaucoup de pue. Je l’avais dit à ma patronne qui ne voulait pas en entendre parler et voulait me voir travailler. J’avais dû utiliser du détergent pour les toilettes pour soigner l’infection.

Plusieurs fois, j’avais pensé fuir de Tambubamba pour retourner auprès de ma famille. Mais comment pouvais-je faire ? Je ne savais même pas dans quelle direction était le village de ma famille. Ma tante m’avait emmené à Tambubamba un soir, la nuit tombée. Impossible donc de retrouver le chemin par lequel nous étions arrivé. Je commençais à désespérer de revoir un jour ma famille.

Heureusement, au bout d’un certain temps, ma mère et mes frères apprirent – je ne sais pas comment – que les conditions dans lesquelles je travaillais étaient loin d’être les meilleures. Ils obligèrent donc ma tante à me faire revenir à Tumbubamba, ce qui bien sur ne l’arrangeait pas dans la mesure où mon travail effectué lui garantissait un salaire mensuel. Mais elle était obligée de me ramener. Mes frères aînés le lui avaient ordonné. C’est de retour chez moi que j’ai fait la découverte du Mouvement des Serviteurs des Pauvres du Tiers-Monde. grâce au Mouvement, je peux aujourd’hui étudier et vivre une adolescence « normale ».

Publié dans Pérou 2008

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